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La Courneuve et la cité Floréal à la fête de l'humanité 1965
La cité Floréal érigée en 1964 pointe au-dessus de la fête de l’Humanité à la Courneuve. Photogramme de « Fête de l’Humanité 1965 » (Jacques Phélut, 1965)

À la charnière de deux époques (1955-1965)

Le PCF produit moins pendant la période, dite de « coexistence pacifique » qui succède à la première guerre froide.
Or, à cette époque, la mue urbaine et sociologique de la banlieue inspire de nombreux sujets et décors de films. Elle est aussi captée avec beaucoup d’acuité dans les reportages et les magazines de société de la télévision. Et des réalisateurs communistes de la RTF, comme Paul Seban, Jacques Krier ou Maurice Failevic souhaiteraient d’ailleurs que la direction du PCF réinvestisse le champ de l’audiovisuel. Mais pour la campagne des municipales en 1965, celle-ci se borne à en recommander l’usage à ses Fédérations.

En regard les unes des autres, les réalisations de cette période sont des produits hétéroclites, à la charnière de deux époques. D’un côté, par exemple, elles cernent avec justesse les problèmes de la banlieue que sont le logement et l’accueil des travailleurs immigrés. De l’autre, elles affichent un optimisme sans pli, à l’instar de l’inauguration de la cité Youri Gagarine à Ivry-sur-Seine en 1963 par le cosmonaute en personne, véritable image d’Épinal de la banlieue rouge1.
Parallèlement, une autre source d’image s’affirme : les films amateurs. L’essor de la société de consommation et d’une classe moyenne comptant aussi les plus qualifiés des ouvriers permet à de nombreux militants de s’équiper de petites caméras. Eux-aussi témoignent de leur culture rouge, comme du cadre de vie banlieusard qui, dans ces années-là, se transforme à vive allure.

La banlieue en débat

Au lendemain de mai-juin 1968, de jeunes professionnels du cinéma, parmi lesquels Jacques Bidou, Robert Bozzi, Brigitte Dornes, et Miroslav Sebestik, créent Dynadia, un collectif dédié à la communication audiovisuelle du PCF. Séduits par la dynamique du programme commun et l’esprit d’ouverture qui souffle sur le PCF, ils ont à cœur de l’incarner. Les municipalités de la banlieue parisienne leur passent commande pour des actualités, puis pour la campagne des municipales de 1971.
Dans ses productions, Dynadia privilégie interviews, parole à la base, micro-trottoirs… sans forcément échapper au (dernier) mot de Monsieur le Maire ni à la liste des équipements publics. Ces films montrent des municipalités toujours bâtisseuses et redistributrices, pionnières de la décentralisation culturelle, cherchant à mobiliser leur population face à l’État afin d’améliorer les conditions de vie et de travail sur leur territoire. Simultanément, le style de Dynadia, qui se veut plus ouvert au débat, laisse percer des failles d’adhésion : il apparait que les élus doivent justifier les choix d’urbanisme qui ont été ceux des années Béton, il arrive aussi que l’offre municipale de culture et loisirs et l’encadrement associatif du PCF marquent le pas auprès des jeunes générations …

Mutations à l’œuvre à Bagnolet.
Extrait de Mieux vivre à Bagnolet. Le débat est ouvert (Miroslav Sebestik, 1971)

Aulnay-sous-bois promeut sa rénovation.
Extrait de Aulnay information : les assises de la vie quotidienne - Informations N°1 (Jean-Pierre Galleppe, 1977).

La banlieue rouge en crise

En 1972, Dynadia (devenue la société Uni/ci/té) s’établit à Bagnolet. La dynamique de l’Union de la gauche autour du programme commun irrigue ses réalisations. Ses sujets vidéo, ses documentaires, puis ses émission télévisées tournés en banlieue rouge témoignent de l’extension de la crise et du chômage, et de la désindustrialisation. Parfois co-réalisés avec les grévistes, ses films tâchent de populariser les conflits d’entreprise comme ceux de Grandin à Montreuil ou de Rateau à la Courneuve...

Après 1976, voyant l’union de la gauche profiter davantage au PS, le PCF resserre sa communication sur son identification à la classe ouvrière, tout en tâchant de la réactualiser, notamment à travers la campagne des Cahiers de la misère et de l’espoir, qui dénonce la pauvreté et l’exclusion sociale. Mais il ne parvient pas à infléchir l’inclination des votes. Ni sa propre image, en crise au tournant des années 1980.
Au cours des deux décennies suivantes, la représentation d’une population ouvrière qui avait prévalu en banlieue rouge, est progressivement supplantée par celle d’une population pauvre et marginalisée2, fortement médiatisée sous le jour de la jeunesse issue de l'immigration.
Les municipalités tentent de palier cette image et cette fragmentation sociale de leur côté. Certaines d’entre elles adoptent l’audiovisuel pour appuyer leurs initiatives de démocratie participative. Largement truffée de micro-trottoirs, leur communication amorce un virage vers une nouvelle mobilisation identitaire : essentiellement territoriale et prônant la « mixité sociale » comme valeur positive, génératrice de solidarité.

 

1 À ce sujet, nous renvoyons vers le magazine documentaire Reflets (Réalisation collective, 1964), dont le dernier sujet est consacré à la venue de Youri Gagarine à Paris et Ivry-sur-Seine

2 François Dubet, La galère, jeunes en survie, Seuil, 1995 cité par Marie-Hélène Bacqué et Sylvie Fol, in Le devenir des banlieues rouges, Coll. Habitat et sociétés, L’Harmattan, 1997, pp. 195-96.



Auteur du parcours : Julie Cazenave

Remerciements à Jacques Girault, Roger Martelli et Emmanuel Bellanger pour leur relecture et leurs commentaires.

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