Né à Genève en 1917, Claude Jaeger grandit dans une famille aisée. Il part faire des études à Paris, censées le destiner à l'Inspection des finances. Entré au ministère des finances en tant que rédacteur, il est mobilisé et ne revient à Paris qu'après l'armistice. Attiré par le cinéma, il commence alors à travailler comme assistant-réalisateur grâce à l'entremise de Nino Frank et Marc Maurette, son ami d’enfance. Parallèlement Claude Jaeger s’engage politiquement. Il devient membre du PCE à l’instigation de Manolo Ascarate, un autre ami d’enfance. A la suite de la rafle des Espagnols en juin 1942, il se réfugie en Zone Sud, par l’entremise du futur cinéaste Gillo Pontecorvo et rejoint le PCI. Les Italiens le mettent en contact avec les FTP à l’automne 1943. Il est d’abord affecté à l’Inter de Paris-Sud en qualité de CE, puis au service de renseignements des FTP (Service B). Responsable ensuite des opérations (GO) en Bretagne- Normandie, il est nommé, sous le pseudonyme de Michelin, commandant de la région M avec le grade de colonel le 1er juillet 1944. Au début de l'année 1945, Claude Jaeger remplace le colonel Fabien après sa mort pendant la campagne d’Alsace. Une fois la guerre terminée, il travaille d'abord dans le cabinet de Lattre de Tassigny, qu'il quitte pour intégrer l'OPC qui devient le CNC en 1946. Responsable de la production au CNC jusqu'au printemps 1950, Claude Jaeger est révoqué pour des motifs politiques. Le PCF lui confie alors la gestion de Procinex, société destinée à produire et à distribuer des films dans l'orbite communiste. Jusqu'au milieu des années 1950, Claude Jaeger s'emploie donc à encadrer la réalisation de nombreux courts-métrages militants, comme par exemple La bataille de la vie (Louis Daquin, 1949), Vive Staline (1949), L’homme que nous aimons le plus (1949) ou Les Américains en Amérique (1950). Afin d'équilibrer les comptes de Procinex, Claude Jaeger développe une production de films institutionnels et de courts-métrages socialement engagés mais moins explicitement politiques (par exemple Mon ami Pierre, réalisé par Paula Neurisse en 1951, Ma Jeannette et mes copains, réalisé par Robert Ménégoz en 1953, ou Des hommes et des montagnes réalisé par Jean-Jacques Languepin en 1953).
Au milieu des années 1950, alors que le PCF décide de ralentir ses activités cinématographiques, Claude Jaeger obtient l'aval du Parti pour transformer Procinex en société de production « classique ». Jusque dans les années 1980, Claude Jaeger accompagne de nombreux longs-métrages : dès 1955, il coproduit Cela s’appelle l’aurore (Luis Buñuel) puis Une aussi longue absence (Henri Colpi, 1961), qui obtient une Palme d'or à Cannes. En 1959-1960, Procinex participe également à une coproduction entre la France et l'URSS : 20 000 lieues sur la terre (Marcello Pagliero, 1960). Dans les années 1960, Procinex multiplie les longs-métrages de fiction : La poupée (Jacques Baratier, 1961), Le diable et les dix commandements (Julien Duvivier, 1962), La chasse à l’homme (Edouard Molinaro, 1964), Un drôle de caïd (Jacques Poitrenaud, 1964), La voleuse (Jean Chapot 1966), Mademoiselle (Tony Richardson, 1966), le Mur de Serge Roullet (1967), La Révolution d’octobre (Frédéric Rossif,1967). Dans les années 1970, sont produits (ou coproduits) Kill (Romain Gary, 1971), La femme aux bottes rouges (Luis Buñuel, 1974), Le messie (Roberto Rossellini, 1975), Laisse-moi rêver (Robert Ménégoz, 1979). Dans les années 1980, l’activité de Procinex ralentit : sont menées à bien deux comédies, T’es folle ou quoi (Michel Gérard, 1982), Prends ton passe montagne, on va à la plage (Eddy Matalon, 1982) et une coproduction avec la Tchécoslovaquie, David Thomas et les autres (Lazlo Szabo, 1985).