Après le coup d’État du 11 septembre 1973 du général Augusto Pinochet qui renverse le gouvernement du président Salvador Allende, la junte militaire prend le pouvoir au Chili, imposant une dictature. Plusieurs milliers de personnes sont emprisonnées, torturées par la Dina (Dirección de inteligencia nacional / Direction nationale du renseignement), la police politique chilienne, tuées, “disparues”. C’est ce moment de l’histoire chilienne que raconte ce film de Marcos Galo, réalisé à partir de banc titre de tapisseries chiliennes, les arpilleras, et d'une lettre d’une femme chilienne, lue par Marianne Auricoste, sur les conditions de vie et la lutte des femmes chiliennes vivant dans des camps. L’ensemble du film est soutenu par une musique composée par Sergio Ortega, chantre de « La Nueva cancion chilena » (la nouvelle chanson chilienne), mouvement d'expression musicale combinant éléments du folklore et engagement pour la justice sociale. Celle-ci est interprétée par le groupe Aparcoa, un des principaux groupes du mouvement de « La Nueva cancion chilena », alors exilé en Europe.
Chaque thème évoqué dans la lettre - qui sont autant de moments de la vie quotidienne sous la dictature (la vie au camp, les arrestations, l’entraide et la solidarité, les difficultés pour se nourrir, le chômage, l’espoir, l’école, les enfants, les luttes, etc.) - est illustrée par une ou plusieurs arpilleras, ces tableaux de textile cousus à la main par ces femmes chiliennes. Cette forme d'expression permettait aux femmes, compagnes de prisonniers politiques, d’exprimer leurs craintes et angoisses mais également leur espoir. Dénonçant les violences du régime autoritaire chilien, ces tapisseries-broderies témoignent également de la résistance à toute épreuve de ces femmes.
Réalisation : Marcos Galo
Lieu : Chili
Musique de Sergio Ortega Interprétée par Aparcoa
Mots-clés : femmes, lutte, résistance, répression, églises, paix, solidarité
Lieux de consultation : Ciné-Archives, Archives départementales de la Seine-Saint-Denis
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Générique de début.
[Musique].
“Lettre du Chili”.
Broderie présentant le visage d’un petit garçon [ci-après nommée broderie garçon].
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“Les “arpilleras” : des broderies sur de la toile de jute, sont avant tout oeuvres des femmes de notre peuple : épouse, mère, soeur fille de prisonnier politique, de disparu. Les “arpilleras” s’enracinent dans le plus profond du patrimoine culturel du peuple chilien. - Aujourd’hui, les “arpilleras” ne nous renvoient pas seulement à l’héritage de Violeta Parra ou des brodeuses d’Isla Negra ; elles témoignent aussi de la renaissance d’un puissant mouvement créateur des masses. - C’est encore une réponse courageuse et lucide contre l’oppression, elles sont sans doute le produit d’une soif de justice et de résistance.”
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Succession rapide de plusieurs arpilleras (ci-après nommés broderies) représentant des maisons, des arbres et des femmes.
[bruit d’orage par-dessus la musique]
Broderie représentant des femmes et des maisons sous la pluie.
[La musique s’arrête]
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Broderie présentant une femme balayant devant sa porte [ci-après nommée broderie mère] suivie de la broderie garçon.
Voix off féminine raconte : “Dis-donc fils, c’est l’heure de l’école”.
Le fils part : “Ciao maman.”
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Broderie montrant le garçon partant à l’école.
[la musique reprend].
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Broderie mère :
Voix off féminine reprend : “Je vous écris pour vous dire comment nous vivons, pour vous expliquer comment nous luttons. Ce n’est pas une lettre comme les autres. Ce n’est pas non plus ma lettre. Je parle aussi pour d’autres. Nous sommes nombreuses à vous adresser ces lignes et c’est toutes ensembles que nous avons réfléchi, préparé cette lettre qui vous est destinée. En l’écrivant, nous versons parfois des larmes mais comme nous marchons main dans la main, nous sommes finalement plus fortes qu’avant.”
Panoramique horizontal (droite à gauche) sur une broderie montrant des femmes sortant de leur maison, au balcon. Puis panoramique horizontal (gauche à droite) sur une broderie représentant des chats sur un fil tendu au-dessus de maisons.
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Suite du panoramique sur la broderie : femmes qui font la queue avec leur seau à la pompe à eau.
“Vous comprenez [...] que c’est ici que nous vivons. Nous sommes nombreuses à loger dans ces campements. Vous devez comprendre que le droit d’occuper ces terrains, nous l’avons obtenu en nous organisant et en surmontant beaucoup de difficultés et d’injustice.
Zoom sur un détail d’une broderie montrant deux personnages (un homme et une femme) portant un seau).
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“Nous avons dû occuper la place en y plantant notre drapeau aux trois couleurs portant une étoile.”
Broderie présentant des personnages - hommes et femmes - marchant dans la rue.
“Et tous ensemble, nous avons tracé nos rues, bâti nos maisons et nos écoles.”
Broderie de gens marchant dans la rue, au milieu des maisons.
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Broderie montrant des enfants jouant au milieu des maisons.
Détails d’une broderie présentant des hommes réparant des toits.
“Réparer des toits, capter l’électricité au poteau, l’entraide s’est concrétisée. [...] Nous avons même l’eau au campement [...] Un seul poste pour nous tous.”
“Campement el copihue”.
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La narratrice cite trois noms dont Pablo el Neruda et Violeta Parra expliquant que “les fascistes ont voulu changer ces noms là ; ils voulaient effacer le passé”.
Broderie représentant une gare, des voyageurs avec leurs valises et un train.
Broderie montrant un balai géant balayer des maisons.
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“Après ils ont pensé : s’ils restent ensemble, ils vont sûrement s’organiser. Alors ils ont expulsé des familles et des familles. Des campements entiers sont ainsi nettoyés.”
Broderie montrant des miliciens surveillant la population puis détail sur un des miliciens.
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Plusieurs broderies montrant des personnes en train de déménager leurs meubles.
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“Et puis ils sont venus, les bandits de la Dina, en camion, armés jusqu’aux dents”. [Dina : Dirección de inteligencia nacional (Direction nationale du renseignement), la police politique chilienne pendant la dictature militaire d'Augusto Pinochet] “Ils préfèrent la nuit pour agir.”
Détail d’une broderie montant une arrestation.
La voix explique que les miliciens ont embarqué Pedro, Juan et son mari.
Détail d’une borderie montrant un homme derrière des barreaux.
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Broderie présentant une femme assise sur une chaise dans sa maison, le coeur transpercé. Zoom avant sur le visage et le buste de la femme. Elle pleure.
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Broderie montrant une femme aux fourneaux devant sa maison. À côté d’elle, ses enfants sont attablés.
La voix explique que la famille n’a plus à manger : “Les prix grimpaient et tout partait en fumée”. Détail des fourneaux : on discerne de la fumée sur les réchauds à la place des marmites.
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“Ils ont cru que la peur, la faim et la misère allaient nous abattre, nous anéantir.”
Broderie montrant des femmes en file indienne portant des seaux.
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Broderie présentant une femme accrochant du linge en extérieur. À ses côtés, son bébé.
Détail d’une broderie montrant une jeune fille portant une lettre.
La femme explique le pourquoi de la lettre : “pour que vous sachiez où, comment et pourquoi nous luttons”.
Autre détail de la broderie montrant une bouteille de lait s’envolant d’une grange. Zoom arrière : dans le ciel, plusieurs bouteilles volent de leurs propres ailes.
La femme annonce qu’aujourd’hui de nouveau au Chili, “la justice s’est installée partout.”
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Broderie présentant une femme accrochant du linge en extérieur. À ses côtés, son jeune enfant.
Détail d’une broderie où l’on voit voler une boite de thé et une autre de café. Autre détail montrant une bouteille d’huile, une boite de thé et une autre de viande s’envoler. Au-dessous des personnes lèvent les bras pour tenter de les attraper.
La femme évoque les emprisonnements, les tortures, les assassinats et parle des disparitions des victimes.
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“Tous les crimes ils les ont commis, contre les femmes, les hommes, les jeunes, les vieux.”
Détail d’une broderie présentant l’étal d’une poissonnière qui pèse du poisson. À côté, une femme et ses enfants portent des sacs.
Vue de la broderie dans son ensemble : une rue sur laquelle circulent des passants et, de part et d’autre, des maisons et la poissonnerie.
“S’ils pouvaient s'emparer du soleil, ils le feraient sûrement. De rage, ils détournent les fleurs, les jettent dans des cachots, privant les miséreux de leurs radieuses couleurs.”
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La femme explique qu’elle a alors compris qu’il fallait trouver les moyens de s’organiser, “ensemble à l’atelier de tapisserie”.
Broderie montrant plusieurs femmes en intérieur brodant autour d’une table. Zoom avant sur plusieurs détails de la broderie.
“Ensemble au lavoir”.
Broderie présentant des femmes au lavoir.
“Ici, là, ailleurs, partout.”
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Détail d’une broderie montrant une femme au-dessus d’une marmite sur le feu.
Broderie d’une scène extérieure : au centre, une femme accroche du linge.
Broderie présentant plusieurs femmes lessivant ou accrochant du linge.
Détail d’une broderie montrant deux marmites sur le réchaud, l’une de soupe, l’autre de purée.
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“Et l’école, la salle de réunion, sont remplies de tables très longues.”
Plusieurs broderies sur ce thème, l’une présentant un réfectoire, une autre une grande table ronde avec des femmes ou des jeunes filles assises autour, d’autres encore des tables rectangulaires... La voix précise que ce sont des cantines pour les enfants.
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La femme évoque le manque de travail, le chômage.
Broderie montrant des femmes faisant la queue pour obtenir un poste (“un vacante”).
“Ils nient le droit au travail. Et c’est là que commence une autre étape du combat.”
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Broderies montrant un “pot commun”, symbole de la marmite contenant la soupe populaire, celle que se partagent les chômeurs dans la rue.
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Zoom arrière sur une broderie montrant un garde devant la porte d’une maison, symbolisant une prison. À l’extérieur, plusieurs personnes en file indienne portant des paquets. “Nous décelons les bâtiments où ils tiennent les prisonniers. Nous y allons ensemble et nous crions : Liberté !”
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“ Nous recherchons les disparus.”
Broderie montrant des gens devant une église. Certains sont assis sur un banc. Zoom sur une partie de la broderie : détail d’une femme tenant un bébé dans ses bras.
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La femme explique qu’ils ont mené une grève de la faim devant le siège des Nations Unies à Santiago. “Le tyran a eu peur parce que dans le monde entier résonnait le mot “solidarité”.”
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“La junte cynique camoufle ses crimes derrière le mensonge.”
Broderie montrant un enfant dans les bras de sa mère. Zoom arrière : l’inscription “¿dónde está papá?” (Où est papa ?) apparaît.
“Où sont-ils les disparus ? Nous exigeons une réponse. On entend “Non, vos parents n’existent pas”.”
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Broderie montrant le Tribunal de la la Justice duquel s’échappe un cri : “Non”.
“Les tribunaux, les juges qui ont la garde des lois, même ceux de la Cour suprême disent qu’ils ne savent rien. Rien. Jamais. Personne ne pourra nous empêcher de lutter pour la vie des nôtres.”
Focus sur des balances de la justice.
“Eux, les prisonniers, les disparus, où qu’ils soient, luttent pour la vie telle que le peuple la veut, pour la vie et la liberté. Nous en sommes sûrs.”
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Plusieurs broderies, l’une présentant le Jugement final, une autre un fanion avec une main et l’indication “el camino del bien y del mal”, une troisième le diable, etc.
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Broderie présentant une église vue de l’extérieure, une autre, l’intérieur d’une église avec le curé et deux petites filles.
“Dans les églises, on se rassemble par milliers. Les flammes des cierges, symboles de la vie des nôtres, éclairent aussi notre espoir. On exige, là aussi, de connaître la vérité. L’union s’affirme chaque jour, dans chaque action.”
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Broderies sur le thème de la paix. Détails de broderies montrant des colombes dans le ciel.
“Nous, femmes chiliennes, nous tenons à vous faire savoir que la lutte s’accroît, se développe, se diversifie. Avec nos mains et par nos voix, nous témoignons pour d’autres mains, d’autres voix. La solidarité est notre force, notre espoir éclaire l’avenir. Chaque jour nous fortifions la lutte en pensant à nos enfants.”
Détail d’une broderie sur deux mains qui se serrent.
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Broderie garçon à la fenêtre : zoom avant sur le visage du garçon.
“Les enfants doivent aller à l’école, jouer, rêver.”
Broderie montrant des enfants faisant une ronde.
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Broderie d’un chapiteau de cirque.
“Le soleil se lève et se couche sur la Cordillère mais qui peut ignorer au prix de quels sacrifices survivent les cantines enfantines, les soupes des chômeurs ?”
Broderie garçon.
“Quelle somme d’efforts et de douleurs nous coute la préparation des milliers de réunions, organisation d’assemblées de prières pour la vérité, les manifestations dans les rues, les grèves sur les chantiers et les grèves de la faim ? Tout notre peuple participe au combat et sa voix franchit les frontières.”
Plusieurs détails de broderies représentant le soleil.
“Dites nous s’il est vrai que notre grève de la faim commencée à Santiago, puis suivie dans toutes nos villes, a été prise en relais par les Chiliens de l’exil et qu’ils furent soutenus solidairement, au siège de l’Unesco et dans des églises, à Paris, dans des capitales d’Europe et dans d’autres pays du monde ? Si cette nouvelle est vraie, alors il a raison celui qui dit : “Aujourd’hui cette coupe, cette terre t’appartiennent. Conquiert les. Écoute et bientôt tu verras à nouveau poindre l’aurore.”
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Générique de fin
Cartons :
Documentation Marcelle de Rennes France, Amérique Latine,
Texte Augusto,
Voix de Marianne Auricoste,
Musique Sergio Ortega,
Interprétée par Aparcoa,
Enregistrement et mixage Madeleine et Philippe Beaucamp,
Prise de vue Marcos Galo,
Montage Jacqueline,
Réalisation Marcos Galo,
Amérique du Sud - Broderie (artisanat) - Chili - Lutte - Résistance